30 novembre 2023

Décarbonation du Bâtiment : l’immobilier tertiaire en route vers un avenir vert

Gouvernance/Prise de parole

La décarbonation de la filière bâtiment a sa feuille de route. Présentée en 2023, elle a été élaborée grâce à une concertation orchestrée par Philippe Pelletier, président du Plan Bâtiment Durable. « La diversité des groupes de travail, associée à un tour de France, a permis de dégager des pistes consensuelles, explique-t-il. Cependant, un point délicat demeure : le sujet de l’emploi et des compétences n’a pas été pleinement abordé ».

L’immobilier tertiaire, qu’il s’agisse de bureaux, commerces, plateformes logistiques… représente environ 6% des émissions annuelles de carbone selon les données de l’Ademe. « Bien qu’il ne soit pas le principal responsable, le secteur doit néanmoins s’engager dans une démarche de décarbonation, il ne s’agirait pas de devenir à l’avenir le mauvais élève », prévient Magali Saint-Donat, vice-présidente de la commission RSE. Pour ce faire, Magali Saint-Donat insiste sur la nécessité de piloter les consommations énergétiques et de privilégier la réutilisation des bâtiments existants. Reste à résoudre l’épineuse question financière et la nécessaire mobilisation de budgets dédiés à la maintenance. « La maintenance ne composait pas le cœur des budgets des directions immobilières jusqu’à présent, rappelle Frédéric Goupil de Bouillé, président de l’Association des Directeurs Immobiliers (ADI) et directeur exécutif chez SNCF Immobilier. Autre sujet à lancer : la nécessaire formation, notamment sur la prise en main efficace des GTB. »

Pourquoi alors le secteur tertiaire est-il en première ligne ? Rappelons que le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) a publié à l’été dernier le plan de décarbonation de chaque secteur. Dans celui dédié au bâtiment, le document de présentation indique que le SGPE prévoit une augmentation significative des investissements annuels dans le tertiaire d’ici à 2030, passant de 4 milliards d’euros en 2022 à 15 milliards d’euros d’ici la fin de la décennie. « Le tertiaire est considéré comme pionnier dans l’adoption de la sobriété énergétique », rappelle Philippe Pelletier.

De fait, la pression s’accroît sur les entreprises, leur direction immobilière, mais aussi les promoteurs immobiliers qui accompagnent ces dernières dans le développement et la remise à niveau de leur patrimoine. « En 2022, Icade a fait valider ses objectifs de décarbonation par le SBTi sur la base d’un scénario à +1,5 degré ce qui a des conséquences concrètes sur sa stratégie de développement », indique Flore Jachimowicz, directrice exécutive RSE & Innovation d’Icade. Pour l’entreprise, cet engagement a des conséquences très concrètes sur sa stratégie : « nous utilisons des matériaux plus légers en carbone, nous nous raccordons aux boucles de chaleur et de froid lorsqu’elles sont développées sur le territoire, etc. Nous avons également lancé un plan d’investissement de 100 M€ entre 2022 et 2026 pour accompagner l’ensemble des métiers sur la décarbonation de notre activité. »

Nexity s’est engagé à respecter cette trajectoire depuis 2 ans « ce qui implique de développer des immeubles qui répondent aux objectifs de la RE 2020 moins 10% au minimum, et cela pour chaque seuil, pose Loïc Daniel, directeur général délégué de Nexity Entreprises. Nous avons également l’objectif d’éco-rénover 3,5 millions de m² de bureaux d’ici à 2025. Le tout, avec une ligne de conduite : proposer du bas carbone abordable. Notre direction de la R&D traque le carbone tout au long de la chaîne de production et d’exploitation. Pour y arriver, nous pensons qu’il faut développer « la juste tech » dans les programmes immobiliers. »

Si les partenaires des Directeurs immobiliers évoluent, les utilisateurs doivent également changer de paradigme. « Les directeurs immobiliers doivent accepter que le prix des projets soient un peu plus élevés que par le passé, que les projets soient restructurés et non plus neufs, et aussi, envisager que certains de leurs immeubles soient reconvertis en autre chose que du tertiaire, je pense par exemple à l’hébergement », insiste Magali Saint-Donat. Ces surcoûts seront assumés « si la dimension durable est intégrée au cœur de la stratégie de l’entreprise », estime Frédéric Goupil de Bouillé. Pour Flore Jachimowicz, ils seront d’autant plus faciles à financer si « la valeur verte des actifs et l’intensité d’usage émergent ». 

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