31 mai 2023

ADI : “Les salariés mettent en concurrence le bureau et leur domicile” Frédéric Goupil de Bouillé

Lu dans la presse

Article de Benoit Barbedette

31 mai 2023

« Le questionnement porte sur la raison d’être du bureau pour le salarié. Les salariés mettent en concurrence le bureau et leur domicile avec, pour une majorité, le fait de reconnaître qu’ils sont mieux chez eux. Le télétravail est un acquis social obtenu sans lutte. Les jeunes le demandent sans le pratiquer nécessairement et les plus âgés sont moins dans la demande mais le pratiquent. Le message peut paraître alarmant mais il s’impose à nous. Le bureau doit suivre l’évolution de la société qui porte de nouvelles valeurs sociales et sociétales, d’échanges, de convivialité, de partage et d’engagements aussi… », déclare Frédéric Goupil de Bouillé, président de l’association des directeurs immobiliers (ADI), le 25/05/2023.

L’association organise le 31/05/2023 à Paris un événement sur « comment utiliser les bureaux pour donner corps aux engagements RH et ESG ? ». Les thématiques : le bureau à impact social positif, la mesure des attentes des salariés en matière de diversité et d’inclusion, l’aménagement de bureaux divers et inclusifs… « La semaine des quatre jours devient un élément de réflexion. Cette réalité a forcément un impact sur l’immobilier tertiaire. Les chiffres de fréquentation remettent au centre du jeu des atouts comme le cœur de ville, la proximité des transports et des commodités… », indique Frédéric Goupil de Bouillé. 

Selon lui, une « vacance s’est institutionnalisée. Le marché du bureau est frappé de plein fouet, comme en 2008. Il y a des bureaux périmés. En 2e couronne de la région parisienne, des friches tertiaires sont visibles car les valeurs d’usage de nombreux bâtiments ont dégringolé ».

Frédéric Goupil de Bouillé répond aux questions de News Tank.

« Le flex office ne parvient pas à faire remonter la fréquentation »

L’ADI organise un événement le 31/05/2023 à Paris sur le thème « Pour un bureau divers et inclusif ! » et sur la définition des bureaux à impact social positif. Pourquoi cette double thématique ?

Car c’est l’actualité chez les utilisateurs de bureaux et chez nos adhérents. Le questionnement porte sur la raison d’être du bureau pour le salarié. Les salariés mettent en concurrence le bureau et leur domicile avec pour une majorité le fait de reconnaître qu’ils sont mieux chez eux. Le télétravail est un acquis social obtenu sans lutte. Les jeunes le demandent sans le pratiquer nécessairement et les plus âgés sont moins dans la demande mais le pratiquent. Le message peut paraître alarmant mais il s’impose à nous. Le bureau doit suivre l’évolution de la société qui porte de nouvelles valeurs sociales et sociétales, d’échanges, de convivialité, de partage et d’engagements aussi… Le bureau, sans être un lieu de débats politiques, doit prendre en compte les demandes de la société.

Êtes-vous en phase avec les chiffres sur les taux de vacance et taux d’occupation, et les constats sur l’obsolescence de nombreux immeubles tertiaires et risque de dépréciation des actifs… ?

Le marché du bureau est frappé de plein fouet »

Oui, nous vérifions tous ces chiffres sur le terrain. Une vacance s’est institutionnalisée. Le marché du bureau est frappé de plein fouet, comme ce fut le cas en 2008. Il y a des bureaux périmés. En 2e couronne de la région parisienne, des friches tertiaires sont visibles car les valeurs d’usage de nombreux bâtiments ont dégringolé. Dans les grandes entreprises, les taux de fréquentation sont dramatiquement bas certains jours de la semaine. Le mardi est la journée de pointe, à plus de 60 %, et le vendredi, le chiffre s’effondre. Le flex office ne parvient pas à faire remonter la fréquentation. Dans ces grandes entreprises, on observe un taux moyen d’utilisation de 40 %. La semaine des quatre jours devient un élément de réflexion. Cette réalité a forcément un impact sur l’immobilier tertiaire. Ces chiffres remettent au centre du jeu des atouts comme le cœur de ville, la proximité des transports et des commodités… Dans ce contexte changeant, nous continuons de surveiller les taux de fréquentation.

Que pensez-vous des états généraux de La Défense sur la transformation des tours dont la conclusion est prévue le 26/06/2023 ? La tour a-t-elle encore un sens au vu des évolutions sociétales ?

Il faut d’abord défendre ce quartier d’affaires qui est le premier d’Europe. C’est une fierté d’avoir ce type d’équipement. De plus, il abrite de beaux objets architecturaux. Cela dit, La Défense est à un tournant de son histoire. Il faut en faire un lieu vivant, du matin au soir. La dalle qui était un lieu de passage devient un lieu de vie comme la rue et c’est appréciable. Concernant le débat sur les tours, leur atout réside dans l’économie de foncier. La densité des hauts immeubles répond au principe du ZAN.

L’ADI a récemment publié un livret pratique à destination des entreprises consacré à la mobilisation des occupants et à la rénovation énergétique du parc de bureaux. Quel message votre association veut-elle promouvoir ?

La production d’une base documentaire de savoirs, à destination des professionnels, fait partie de nos missions. Un 4e livret pratique sur le décret tertiaire doit paraître début 2024 sur les travaux d’économie d’énergie après le 3e livret, publié en mars 2023, consacré à la mobilisation des occupants. Ce levier est non négligeable car des gains de consommation de 10 à 20 % peuvent être atteints. Pour l’ADI, l’obligation de rénovation énergétique du parc de bureaux, commerces et locaux d’activité est un enjeu central.

Pourquoi l’ADI anime-t-elle la conférence sur le marché de l’actif industriel (« Ou comment la réindustrialisation de la France passe aussi par l’émergence d’un marché valorisant une classe d’actifs délaissés ») au SIMI à Lyon le 28/06/2023 ?

Améliorer le fonctionnement de Cartofriches »

La réindustrialisation est un enjeu important pour les adhérents de l’ADI. Nous avons publié en septembre 2022 un manifeste avec 12 propositions qui doivent faciliter la vie des entreprises. La proposition n° 1 par exemple concerne Cartofriches, du Cerema, dont il faut améliorer le fonctionnement. Pour créer de la liquidité et rendre attractif l’immobilier industriel auprès des investisseurs, il va falloir débloquer les nombreux freins administratifs et fiscaux. Il faut aborder cet immobilier comme des locaux banalisés qui dans leur cycle de vie et sur une longue durée peuvent accepter différents processus de transformation, sans qu’il y ait un coût carbone important.

Comment se préparent les prochains trophées de l’ADI dont le Jury est présidé par l’architecte et urbaniste Anne Démians ?

Sur l’adaptabilité des espaces construits à nos modes de vie, sur son approche de la conception de la ville de demain, nous partageons les idées d’Anne Démians, membre de l’Académie des Beaux-Arts depuis janvier 2023, et nous souhaitons mettre à l’honneur sa personnalité. C’est un honneur pour l’association de l’avoir à nos côtés pendant un mois. Le jury s’est tenu le 22/05/2023 et les échanges, sous la direction d’Anne, ont permis de choisir un palmarès représentatif des enjeux de l’immobilier et plus particulièrement de la fonction. La cérémonie de remise des trophées se tiendra le 14/06 lors du 10è Rendez-vous annuel des directeurs immobiliers et mettra en valeur un professionnel, un projet ou une innovation.

Quelle est la position de l’association sur le tout-numérique dans le bâtiment et la gouvernance de la donnée au centre du « smart building » ?

Le bâtiment doit porter une valeur d’usage »

Le sujet de la data est au cœur de nos discussions à l’ADI car elle intervient à deux niveaux. Le premier concerne les bâtiments et ses caractéristiques intrinsèques telles que l’acoustique, la température, la qualité de l’air intérieure, les fluides, les éléments de durabilité d’un bâtiment… Le 2e niveau, ce sont toutes les fonctions pour l’utilisateur. Nous avons besoin de toutes les informations. La donnée digitalisée est un outil de décision qui permet d’être proactif dans la maîtrise des consommations d’énergie, par exemple. Ce qui justifie que nous revendiquions la propriété des données. C’est le nerf de la guerre. Avant d’être une valeur financière, le bâtiment doit porter une valeur d’usage.

Le contexte général dans l’immobilier tertiaire fait émerger de nouveaux types de baux, plus flexibles, plus modulables… Est-ce votre analyse ?

Grand nombre de baux de trois ans »

Nous constatons cette évolution avec un grand nombre de baux de trois ans, en phase avec le rythme de déménagement des entreprises. Mais cette évolution suit deux directions. Il y d’abord la recherche de variabilité pour coller au plus près de l’activité de chaque entreprise et à la souplesse des organisations. C’est visible dans les bureaux opérés et le développement de prestations de service, associées au bail. La 2e raison a trait à la taxinomie européenne et aux obligations vertes, concentrées sur la sobriété énergétique. Elles font forcément évoluer la nature des baux.

Article de Benoit Barbedette

https://cities.newstank.fr/tour

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